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Entretien | Prof. Abdel Rahamane Baba-Moussa, STP-PDDSE

  • stp-pddse
  • 11 mai 2017
  • 8 min de lecture

« C’est chaque cadre, chaque acteur du secteur de l’éducation qui doit être porteur de ce projet et y contribuer avec tout le patriotisme qu’il faut… »


Le Plan Sectoriel de l’Education Post 2015 a pris son envol. Le diagnostic sectoriel est réalisé, les modèles de simulation sont en cours. A travers cette interview, le Secrétaire Technique Permanent du Plan Décennal de Développement du Secteur de l’Education (STP-PDDSE), fait le point d’étape.



Nous venons de terminer le premier quart de l’année 2017. Quel état des lieux peut-on faire de l’élaboration du PSE post 2015 ?


L’état des lieux, c’est déjà que le diagnostic est fini et il est clair. On est en train de prendre les dispositions pour sortir les documents de référence en trois formes. Le gros document fait vraiment le bilan et est une source d’informations très importantes pour l’ensemble du secteur pour les prochaines années. C’est un document de synthèse proposé par l’expert que nous avons relu, corrigé et alimenté. Nous le lui avons renvoyé pour faire une dernière retouche. Nous allons également éditer une plaquette que nous appellerons « comprendre la nouvelle architecture du système éducatif ». Elle permettra de faire la vulgarisation des innovations contenues dans le PSE Post 2015. Les éléments de diagnostic que nous avons, doivent être concrétisés à travers un modèle de simulation. Ce modèle a la difficulté d’avoir à introduire la dimension passerelle de l’éducation non formelle qui n’est pas une démarche habituelle dans l’élaboration des modèles de simulation. C’est à ce niveau que nous avons le plus besoin d’informations alors que les statistiques manquent cruellement. Pour projeter des statistiques à 2030, il faut savoir où est-ce qu’on en était en 2015, en 2014. Or, pour tous les secteurs, on n’a pas des statistiques complètes et fiables. Nous avons des décisions de réformes de l’Enseignement Technique qui sont en cours et qui n’ont pas encore eu des textes. Les réponses que nous avons nous disent qu’elles seront implémentées à partir de 2019. Le gros problème, c’est au niveau de ce modèle qui est déjà structuré. Pour la plupart des secteurs, il y a déjà quelque chose qui existe, des informations qui sont à intégrer, et nous avons besoin que les différents sous-secteurs valident ces informations-là et pour celles qui manquent, qu’on les complète. Nous avons le cadre du modèle en ce qui concerne l’alphabétisation qui n’est pas encore finalisé. Nous pensons associer les cadres de ce ministère pour qu’ils nous proposent quelque chose que nous allons finaliser avec les acteurs. La grosse difficulté, c’est que c’est un processus participatif. C’est plusieurs ministères, c’est plusieurs cadres de tous horizons qui sont concernés et le Secrétariat Technique Permanent malgré sa bonne volonté a du mal à mobiliser tout le monde en temps réel pour avoir l’information. C’est ce qui retarde un peu le processus. Nous espérons que d’ici la fin du mois d’avril, nous allons finir avec ce modèle de simulation et c’est là que les DPP des sous-secteurs doivent prendre le relai pour nous élaborer un Plan dans les plus brefs délais pour qu’on ne s’éloigne pas trop des échéances fixées.


Au regard du diagnostic, quels sont les grands défis du système éducatif ?


Pour moi, le grand défi, c’est de faire en sorte qu’entre 6 ans et 16 ans, comme écrit dans le modèle, aucun enfant, aucun jeune béninois ne soit oublié. C’est-à-dire où qu’ils soient, qu’il y ait un regard éducatif posé sur eux pour leur permettre d’acquérir les savoirs fondamentaux, des compétences sociales de base qui leur permettront de faire leur choix de poursuite d’études après l’éducation de base, de pouvoir vivre aussi dans leur société et de comprendre aussi le minimum des exigences de la société parce qu’il ne faut pas oublier que l’éducation, ce n’est pas seulement les savoirs savants, scientifiques, mais c’est aussi les questions de citoyenneté et de participation à la vie sociale. C’est cette réforme là pour moi qui est le grand défi. Pour cela, il faut pouvoir généraliser autant que possible, pour le plus grand nombre, une scolarisation obligatoire. Même si, nulle part, cela n’a été formulé comme obligatoire, on a dit de faire en sorte que 100 % d’ici 2030, des enfants de 6 à 16 ans bénéficient au moins de 9 années de scolarisation. Donc, comment concrètement structuré ces 9 ans de scolarisation, c’est l’un des premiers défis par rapport à l’objectif global que j’ai énoncé. Deuxième défi : comment accompagner les jeunes qui ont d’autres types de capacités, d’aptitudes et de compétences, notamment qui ont des aptitudes en matière de pratique, d’utilisation de leurs mains, les pratiques professionnelles dans les différents champs de l’artisanat et je veux rêver aller jusqu’à penser en matière de culture, de loisirs, de sport afin qu’on puisse les orienter vers les dispositifs éducatifs qui leur permettent de valoriser ces aptitudes. Peut-être de les préparer à une insertion professionnelle dans ce secteur sans oublier les savoirs fondamentaux c’est-à-dire la lecture, l’écriture, le calcul, la logique de raisonnement, l’innovation, la créativité dont tout le monde doit pouvoir bénéficier. Il faut un dispositif d’orientation transversale qui fonctionne et qui tienne compte de cela. Il faut définir institutionnellement le cadre de cette nouvelle éducation de base. Pour le scolaire, ça existe. Il faut quelques réajustements. Mais pour les autres, il faudra savoir comment faire l’arrimage avec l’éducation notamment pour les centres alternatifs, pour les centres d’artisanat qui doivent être progressivement pris en compte dans la réflexion éducative. Le dernier défi, c’est le cadre normatif. Quelles sont les normes ? Il y a des normes pour le secteur de l’éducation formelle. Mais est-ce qu’il y a des normes pour tous les secteurs de l’éducation non formelle ? Combien d’apprentis un maître artisan peut prendre pour être sûr d’avoir un accompagnement en règle avec ce que nous voulons. Donc, en plus des savoirs professionnels, à partir de quel âge un enfant peut raisonnablement être pris en compte dans l’artisanat. Avant cela, il faudra qu’on fasse en sorte que les enfants soient pris en charge dans le système scolaire. Donc, ces aspects normatifs n’existent pas encore. Combien d’années doit durer l’apprentissage pour obtenir un certificat même si les CQM sont déjà plus ou moins fonctionnels. Mais surtout comment faire pour ne pas tout scolariser. Comment rompre avec l’hégémonie de la forme scolaire pour développer les formes d’apprentissage qui tiennent compte de notre réalité pour que l’enfant qui soit en apprentissage, ne soit pas toujours considéré comme hors de l’éducation. Ça veut dire que l’atelier doit être réorganisé, accompagné pour pouvoir jouer pleinement son rôle éducatif.


Le Bénin va-t-il alors vers un système éducatif de rupture ?


Effectivement ! Je pense que c’est un système éducatif qui va rompre véritablement avec cette idée des ‘’Akowé’’ qui fait que les enfants sont tellement en train de rechercher le parchemin. Il faudra faire en sorte que les gens reflètent exactement leurs connaissances dans les savoirs intellectuels, mais qu’ils reflètent également leurs connaissances dans les savoirs manuels et pratiques pour pouvoir orienter chacun là où il a des aptitudes.


Le Bénin a-t-il les moyens de cette ambition ?


Si un pays comme l’Indonésie en termes de classement entre pays pauvres et pays développés est dans la même catégorie que nous, on peut y arriver. Le Bénin peut. On a eu dernièrement un atelier avec l’Unesco sur la reconnaissance de la validation des acquis d’expérience. On nous a présenté leur modèle. Ils ont trois parcours que sont formel, non formel et informel c’est-à-dire qu’on autorise les parents à s’organiser pour assurer l’accès au savoir de leurs enfants, mais à chaque étape à la fin de l’éducation de base c’est-à-dire à 16 ans, il y a des tests nationaux que tous les enfants subissent. Lorsque vous passez ce test, que vous veniez du parcours formel ou du parcours informel organisé par les parents ou d’institution d’éducation non formelle, vous avez le choix soit de revenir dans le système formel soit de continuer dans le système informel avec les familles ou le système non formel. Donc, c’est un dispositif qui marche et l’Etat a mis en place des fonds pour que ça fonctionne. Et nous savons que le Bénin peut le faire puisque nous sommes l’un des pays qui alloue 30 % des dépenses de l’Etat dans l’éducation. Mais où vont ces 30 % ? Nous savons que ça va dans le fonctionnement, dans le salaire. Il faut trouver le réajustement au niveau des finances pour que certaines dépenses, puisse être sans incidence. Comme je parle toujours du CEP, peut-être qu’il ne faudra pas l’abandonner, puisque, ça aussi, c’est un signal symbolique pour des parents de dire mon fils est admis au CEP. Mais, il faut créer des conditions pour que les milliards de francs qui sont engloutis par cet examen puissent être réinvestis par exemple pour redonner de la place à l’éducation et à la formation professionnelle vues comme les parents pauvres avec l’alphabétisation. Je crois qu’il y a des décisions fortes à prendre au niveau du financement de l’éducation et si l’Etat prend ces décisions, je crois qu’on peut déjà faire des expériences pilotes d’ici à 2019. Les réformes de l’Enseignement Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle vont commencer en 2019. Si on peut déjà commencer à implémenter les premières passerelles formelles d’enfants venant d’être exclus qui ont été orientés sur la base de leurs capacités, nous savons que d’ici à là les études que nous faisons sur l’orientation seraient déjà connues. Si on peut déjà faire les premières expériences entre 2019 et 2021, et qu’à partir de 2021 on ait déjà une idée de comment commencer à élargir, je pense qu’en 2030 même si on n’atteint pas les 100% d’enfants on peut s’en rapprocher et surtout on aurait résolu partiellement la question de la gestion des fonds.


Dans les difficultés abordées, vous n’avez pas évoqué la question politique. Est-ce que le politique n’est pas un frein au processus qui se déroule actuellement ?


Le politique peut être un frein mais dans le cas d’espèce, si je me réfère encore une fois à la réunion avec les ministres, depuis que nous avons commencé le processus, je vois aujourd’hui que nous avons tenu une réunion sous la direction du ministre d’Etat. Nous avons tenu plusieurs sessions avec le ministre chef de file. Nous avons voulu faire une présentation avec les trois ministres en charge de l’éducation sur le diagnostic. Pour le moment, le discours que j’entends est un discours opportun pour ce Plan. Notamment en octobre quand on s’est réuni, et les gens avaient craint que le processus du PSE soit rejeté, la réponse était claire. L’Etat, c’est l’Etat et est garant de ce processus d’élaboration du Plan. Je sais que par ailleurs d’autres dispositions ont été prises puisque le Chef de l’Etat voulait organiser des conférences pour chercher des fonds chez des bailleurs et on a souhaité que ces conférences ne se déroulent qu’après avoir fini le Plan. Et qu’on puisse clairement intégrer l’éducation dans la recherche de financement. Et dans le programme du Chef de l’Etat, vous savez qu’il veut que l’éducation devienne un pôle de croissance surtout qu’on le maintienne toujours dans une dimension sociale comme quelque chose qui ne fait que budgétivore. Je pense que ces éléments-là côte à côte me laissent penser que le politique aujourd’hui n’est pas un frein et je crois que la responsabilité nous incombe tous. C’est chaque cadre, chaque acteur du secteur de l’éducation qui doit être porteur de ce projet et y contribuer avec tout le patriotisme qu’il faut parce qu’il s’agit de définir ce que nous allons proposer à la jeunesse béninoise d’ici à 2030.


 
 
 

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